Choix de la section et de la quantité des tiges filetées (cas d’une muralière)

Bruno, Fanoa, Langa

Définir la dimension, le nombre et l’écart entre les tiges nécessaires à la fixation d’une poutre muralière est toujours un acte difficile pour le novice. De plus, ces choix déterminent la solidité de la fixation et on voit très souvent des ouvrages s’effondrer à cause de tiges sous-dimensionnées ou trop écartées. Cependant, l’autre erreur concerne le sur-dimensionnement. La bonne méthode consiste à faire les bons choix, c’est-à-dire ni trop, ni trop peu et celle que nous vous présentons ci-dessous est à la portée du bricoleur.

Voici un extrait gratuit du guide de construction :

Cette partie du guide concerne le calcul de la section de la tige filetée et de la quantité à répartir le long d’une poutre muralière sur une façade. En effet, on fait souvent appel à la pose d’une muralière dans une structure en bois telles une pergola adossée, une terrasse sur poutre porteuse fixée à une façade, une extension en bois, etc.

Pour ce faire, on utilise les théories et résultats de l’EUROCODE 5 des ouvrages « Vérification des assemblages aux eurocodes » et « Calcul des structures en bois. Guide d’application ».

Schéma de fixation d’une muralière sur une façade
  • Pièce t1 : poutre muralière
  • Pièce t2 : façade porteuse

Voici la méthodologie de calcul :

  1. déterminer la charge de la muralière,
  2. déterminer la résistance d’une tige à partir du tableau des résistances ci-bas,
  3. déterminer le nombre de tiges nécessaires à la muralière et connaître les conditions de pose des tiges sur la poutre muralière,
  4. vérifier la résistance du bois au droit de l’assemblage.

1. Déterminer la charge sur la muralière

La charge d’exploitation pour une poutre muralière dépend généralement de 2 facteurs :

  • la surcharge (neige) sur la toiture (cas d’une pergola, d’une cabane, d’une extension, d’un abri de jardin, etc.) dont la charpente va reposer sur une poutre muralière,
  • la charge permanente et d’exploitation : charge du bois de structure et de la couverture (charge des solives, des pannes, des chevrons, de la toiture, etc.).

La charge d’exploitation dépend de la surface supportée par la muralière. N’oubliez pas que cette surface est probablement supportée aussi à l’autre extrémité, par exemple par une poutre porteuse ou une autre muralière. Il convient alors de diviser la charge sur la surface par deux, puisque la charge est répartie de part et d’autre, dans le cas d’un quadrilatère évidemment.

2. Déterminer la résistance d’une tige

Le tableau suivant énumère les résistances de rupture au cisaillement suivant la classe des boulons :

Classe des boulons 4-6 4-8 5-6 5-8 6-8 8-8 10-8
Coefficient de sécurité 0,5 0,6 0,5 0,6 0,6 0,5 0,6
Résistance de rupture au cisaillement f (daN/mm²) 40 40 50 50 60 80 100

La classe d’un boulon est ce code à 2 chiffres qui est généralement gravé sur la tête de vis (avec le sigle du fabricant) ou dans le cas d’une tige filetée, donnée sur l’emballage. Si celle-ci n’est pas inscrite, il faut demander directement à votre fournisseur.

Que signifie ces chiffres ?

  • Le premier chiffre indique la classe de résistance à la rupture au cisaillement,
  • Le produit de ces 2 chiffres indique la limite élastique. (Exemple : avec la classe 4-6, sa limite élastique est 4 x 6 = 24 daN/mm²).

Il est à noter que la section qui résiste vraiment dans une tige filetée n’est pas toute la section, mais seulement celle omettant le filetage. Le tableau suivant montre les sections résistantes en traction des tiges :

Diamètre nominal (mm) 8 10 12 14 16 18 20 22 24 27 30 33
A : section nominale (mm²) 51 79 113 154 201 254 314 380 452 573 707 855
Ar : section résistante de la partie filetée (mm²) 38 58 84 115 156 192 245 303 352 459 560 693

L’EUROCODE5 définit une formule permettant de calculer la résistance de rupture au cisaillement, en prenant en considération le coefficient de sécurité, et la surface de résistance de la partie filetée.
Le tableau suivant énumère les résistances de rupture au cisaillement selon le diamètre de chaque tige :

Classe des tiges Résistance à la rupture au cisaillement (daN)
Diamètre des tiges (mm)
8 10 12 14 16 18 20 22 24 27 30 33
4-6 464 928 1344 1840 2496 3072 3920 4848 5632 7344 8960
4-8 556,8 1113,6 1612,8 2208 2995,2 3686,4 4704 5817,6 6758,4 8812,8 8960 11088
5-6 580 1160 1680 2300 3120 3840 4900 6060 7040 9180 11200 13860
5-8 696 1392 2016 2760 3744 4608 5880 7272 8448 11016 13440 16632
6-8 835,2 1670,4 2419,2 3312 4492,8 5529,6 7056 8726,4 10137,6 13219,2 16128 19958,4
8-8 928 1856 2688 3680 4992 6144 7840 9696 11264 14688 17920 22176
10-8 1392 2784 4032 5520 7488 9216 11760 14544 16896 22032 26880 33264

En partant d’un diamètre de tige donné, le nombre théorique de tiges nécessaires dans une poutre muralière est obtenu en divisant l’effort subi par cette poutre par la résistance d’une tige. Le nombre réel de tiges doit être supérieur ou égal au nombre théorique de tiges d’une part et d’autre part de leur agencement dans la barre. Cet agencement concerne la répartition équilibrée des tiges dans la muralière tout en considérant les distances minimales obligatoires.

3. Règle de positionnement de la tige dans la muralière

La position des tiges est aussi conditionnée par le diamètre de la tige (on note « d » ce diamètre), leur espacement et leur distance par rapport aux bords de la pièce de bois.

Désignation Valeur minimum Schémas
Espacement sur une file a1 5d
Extrémité a3 Max (7d ; 80 mm)
Rive a4 4d

4. Vérification de la résistance du bois au droit de l’assemblage

Suite à l’insertion de la tige dans le bois, la section de ce dernier a diminué et a réduit la résistance de la section dans le bois. Il est donc aussi nécessaire de vérifier sa résistance comme celle de la tige.

Pour ce faire, il faut connaître la hauteur efficace "he" de la section de bois. Par définition, la hauteur efficace est la distance entre la rive de l’axe et l’axe du boulon le plus éloigné si l’on suit le sens de l’effort appliqué. he = h - a4. Bien évidemment, cette distance correspond à la distance minimum du bord inférieur de la pièce de bois.

Les deux tableaux suivants, tirés de l’ouvrage "Vérification des assemblages aux eurocodes" donnent les résistances du bois massif et de lamellé collé suivant quelques valeurs de hauteur de la section.


TABLE C1 Effort maximal perpendiculaire au fil que peut supporter une pièce de bois massif de l’assemblage d’une épaisseur de 100 mm en daN
he (mm) Hauteur h (mm)
130 140 150 160 170 180 190 200 210 220 230 240 250 260 270 280 290
110 972 972 972 651 651 651 651 651 651 651 651 651 651 651 651 651 651
120 1060 1060 1060 710 710 710 710 710 710 710 710 710 710 710 710 710 710
130 1148 1148 769 769 769 769 769 769 769 769 769 769 769 769 769 769
140 1237 829 829 829 829 829 829 829 829 829 829 829 829 829 829
150 888 888 888 888 888 888 888 888 888 888 888 888 888 888
160 947 947 947 947 947 947 947 947 947 947 947 947 947
170 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006 1006
180 1065 1065 1065 1065 1065 1065 1065 1065 1065 1065 1065
190 1125 1125 1125 1125 1125 1125 1125 1125 1125 1125
200 1184 1184 1184 1184 1184 1184 1184 1184 1184
210 1243 1243 1243 1243 1243 1243 1243 1243
220 1302 1302 1302 1302 1302 1302 1302
230 1361 1361 1361 1361 1361 1361
240 1421 1421 1421 1421 1421
250 1480 1480 1480 1480
260 1539 1539 1539
270 1598 1598
TABLE C2 Effort maximal perpendiculaire au fil que peut supporter une pièce de bois lamellé-collé de l’assemblage d’une épaisseur de 100 mm en daN
he (mm) Hauteur h (mm)
180 225 270 315 360 405 450 495 540 585 630 675 720 765 810 855 900
135 985 985 932 872 834 808 788 773 761 752 744 737 731 727 722 718 715
180 1313 1313 1163 1077 1021 983 954 932 915 901 889 879 871 863 857 851
225 1642 1592 1390 1277 1204 1153 1114 1085 1062 1043 1027 1013 1002 992 983
270 1970 1865 1615 1474 1383 1319 1271 1234 1204 1179 1159 1142 1127 1114
315 2298 2136 1839 1670 1560 1482 1424 1379 1343 1313 1288 1267 1249
360 2627 2408 2062 1865 1736 1645 1576 1523 1480 1445 1415 1390
405 2955 2678 2284 2059 1911 1806 1727 1665 1615 1574 1540
450 3283 2949 2506 2252 2085 1966 1876 1806 1749 1702
495 3612 3219 2727 2445 2258 2125 2025 1946 1882
540 3940 3489 2949 2637 2432 2284 2173 2085
585 4268 3759 3170 2830 2604 2442 2320
630 4596 4029 3391 3021 2777 2600
675 4925 4298 3611 3213 2949
720 5253 4568 3832 3405
765 5581 4838 4053
810 5910 5107
855 6238

Rappelons que ces tableaux ont été considérés pour le cas d’un effort perpendiculaire au fil du bois (cas d’une muralière), de bois de 100 mm d’épaisseur, d’une proportion de charges permanentes inférieures à 2,33 fois la surcharge (G < 2,33 Q) et une durée de l’effort de 1 à 6 mois (exemple d’exploitation sous neige saisonnière de 1 semaine à 6 mois). Pour varier ces valeurs en fonction d’autres conditions de travail, il suffit de multiplier ces charges avec les facteurs (k1, k2, k3, k4) suivants.

  • Coefficient k1 : lorsque l’épaisseur de la pièce diffère de 100 mm
Epaisseur (mm) 60 65 70 75 80 90 100 110 120 130 140 150 160 170 180 190 200
Coefficient 0,60 0,65 0,70 0,75 0,80 0,90 1,00 1,10 1,20 1,30 1,40 1,50 1,60 1,70 1,80 1,90 2,00
  • Coefficient k2 : lorsque l’angle entre les pièces est différent de 90°
Angle 10 15 20 25 30 40 50 60 70 80
Coefficient 5,759 3,864 2,924 2,366 2,000 1,556 1,305 1,155 1,064 1,015
  • Coefficient k3 : lorsque la proportion de chargement (charges de structure G/charges variables Q) change
Proportion de charges de structure Matériau Coefficient
2,33 < G/Q < 3,33 Bois lamellé-collé 0,67
Coefficient à appliquer sur les valeurs du tableau et à comparer uniquement aux charges de structure
Proportion de charges de structure Matériau Coefficient
G/Q > 3,33 Bois massif 0,833
G/Q > 3,33 Bois lamellé-collé 0,55
G/Q < 2,33 Bois lamellé-collé 1
G/Q < 3,33 Bois massif 1
  • Coefficient k4 : durée de la charge
Nature de la charge Durée de la charge Coefficient
Structure permanente 0,833
Stockage 6 mois à 10 ans 0875
Exploitation ou neige avec une altitude > 1000 m 1 semaine à 6 mois 1
Entretien ou neige avec une altitude < 1000 m Inférieure à 1 semaine 1,125
Vent, neige exceptionnelle Instantanée 1,375

Important :

-* le diamètre de perçage du bois ne doit pas excéder le diamètre de la tige filetée plus 1 mm.

  • il est aussi d’usage de mettre un organe de protection entre le bois et la tige afin d’éviter toute friction du bois par la tige et d’éventuelles attaques si la tige change de propriété.

Exemple d’application

Considérons une terrasse en bois sur pilotis de dimension 500 x 500 cm. Elle sera supportée par des poteaux + poutres sur une extrémité et une poutre muralière sur l’autre côté.

Calculons la charge à supporter par la muralière. La surface de charge est la moitié de la surface totale de la terrasse, soit 500 x 250 cm = 125 000 cm² (= 12,5 m²).

  • Considérons un exemple de charge d’exploitation au mètre carré de 265 daN. Ce qui donne une charge d’exploitation totale de 12,5 x 265 = 33125 N = 3313 daN pour la muralière.
  • Dans la région d’Isère (38) à 540 m d’altitude, la surcharge au mètre carré est à 85 kg. Ce qui donne la surcharge climatique totale de 12,5 x 85 = 10625 N = 1062 daN.

La charge totale à supporter par la muralière est donc d’environ 3313 + 1062 = 4375 daN.

J’ai trouvé chez mon fournisseur des tiges de classe 5-8 de diamètre 10 mm. La dimension de la poutre sur l’autre côté de la terrasse est de 150 x 80 mm et on va utiliser la même section pour la muralière.

D’après le tableau de la résistance à la rupture, cette tige peut supporter une charge de 1392 daN. En divisant la charge totale avec la charge d’une tige, on a un nombre de tiges égal à 3,14 unités ; on arrondit à 4 barres de tige.

En calculant la distance minimum a3 de cette tige par rapport à l’extrémité de la muralière, on a une valeur de 80 mm ; mais on va plutôt opter pour une distance de 100 mm. Calculons ensuite l’espacement entre les tiges à partir du nombre de barres nécessaire. On divise alors la longueur restante (longueur totale – distance aux extrémités) par le nombre de tiges ; le résultat donne un espacement de 162 cm ((500 cm – (2 x 7,5 cm))/3). Selon le principe de calcul d’Eurocode, la sécurité est déjà comprise, mais pour plus de précautions, on ne va pas dépasser l’espacement de 100 cm, ce qui nous conduit à ajouter une tige de plus et avoir un espacement de 97 cm ; le nombre de tiges final est donc égal à 6.

Nous allons maintenant vérifier la résistance du bois au droit de l’assemblage. La distance a4 de la tige est de 32 mm. Ce qui veut dire que la tige doit être au maximum à 118 mm du bord supérieur. La hauteur efficace he est égale à 118 mm. On va ramener cette position à 110 mm. La charge que va supporter une telle section est de 972 daN. En vérifiant les coefficients s’adaptant à la situation on a le résultat suivant : 972 daN x 0,80 x 1 x 1,375 = 1069 daN avec une neige exceptionnelle. Après calcul et vérification, la charge maximale à supporter par une tige est de 840 daN. On constate alors que la charge à supporter est inférieure à la charge supportable par la section de bois.

Rondelles plates
Rondelles plates
Écrous hexagonaux
Écrous hexagonaux
Tiges filetées
Tiges filetées

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  • 1. Déterminer la charge sur la muralière
  • 2. Déterminer la résistance d'une tige
  • 3. Règle de positionnement de la tige dans la muralière
  • 4. Vérification de la résistance du bois au droit de l'assemblage
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